Les anomalies utérines chez le West Highlandd White Terrier

 

Vous avez une jolie chienne west highland white terrier, et vous souhaitez qu’elle connaisse les joies de la maternité. C’est un choix qui engage à affronter de nombreuses difficultés, parfois imprévues, comme par exemple des malformations de l’utérus, et les problèmes quelles entrainent.

          L’appareil génital interne de la femelle se compose du vagin, de l’utérus et des ovaires. L’utérus est formé d’un col fin et étroit (qui se dilate pendant la mise bas pour laisser passer les chiots), d’un corps court, et de deux longues cornes où vont se répartir les fœtus durant la gestation.

 Les anomalies de l’utérus ne sont pas détectables avant la mise à la reproduction. Mais dès la première mise bas, la chienne affectée peut se trouver dans l’impossibilité d’accoucher. Cette chienne et ses chiots peuvent même se trouver en danger, si le propriétaire et le vétérinaire ne sont pas avertis des risques liés à ces anomalies.

 De nombreuses lignées

        De nombreuses lignées sont concernées, car le gène suspecté peut rester caché pendant plusieurs générations avant de s’exprimer chez une femelle.
        Il est important pour les éleveurs d’identifier les animaux porteur du gène, particulièrement les mâles, qui bien que dotés d’un appareil reproducteur parfaitement sain, peuvent en être des vecteurs puissants et sournois.

 Le développement de l’utérus

             Chez le fœtus, l’utérus est formé à partir des canaux de Müller, qui se développent vers le bas de l’abdomen, s’accolent et fusionnent entre eux dans leur tiers inférieur. Ils rejoignent le sinus urogénital, avec lequel ils forment le vagin.

 

 Les malformations utérines

         C’est au moment de ce développement que les anomalies apparaissent, touchant les cornes utérines souvent de façon asymétrique, ou le col utérin, ou la partie supérieure du vagin.
         Voici les différentes aplasies et hypoplasies segmentaires utérines que j’ai personnellement observés dans cette race, dans différentes lignées :

 

 Toutes ces anomalies diminuent la fertilité de la femelle affectée, et entravent le bon déroulement de la mise bas, qui ne peut s’opérer sans césarienne.
             L’hypoplasie du col est un développement incomplet du col, qui s’accompagne d’un manque de dilatation et d’élasticité lors de la mise bas, empêchant la naissance du moindre chiot.
             L’hypoplasie d’une corne est un développement incomplet et se traduit par un étranglement qui ne permet pas la sortie des chiots de cette corne vers le corps utérin. Cette corne contient en général un nombre réduit de chiots.
             L’aplasie d’une corne est un développement réduit de cette corne, sans communication avec le reste de l’utérus, ce qui empêche toute gestation dans cette corne.

 

Le gène responsable

 Ces anomalies ont été peu étudiées chez le chien, mais sont bien connues chez la vache.

Elles sont liées à l’existence d’un gène autosome récessif.

Ce gène ne s’exprime que dans certaines races bovines, uniquement chez quelques exemplaires dont la couleur est blanche, en raison d’un second gène autosome récessif qui détermine l’absence de pigmentation. Seules certaines de ces vaches blanches sont atteintes d’anomalies génitales.

Cet aspect, s’il se vérifiait dans l’espèce canine, expliquerait la rareté de ces anomalies, et le fait qu’elles ne touchent que de rares individus de couleur blanche ou quasi-blanche, dans de rares races.

Je n’ai eu l’occasion d’observer qu’un cas en dehors des westies, une femelle Labrador sable très clair, quasi blanche, ce qui est un indice supplémentaire dans la recherche de similitudes avec les gènes présents chez la vache.

 

La mise bas normale

 Durant la première partie de la mise bas, la chienne est agitée, inquiète, respire vite, gratte sa couche. Elle vomit parfois, et refuse de manger. Ce comportement correspond à une augmentation progressive des contractions utérines, et à une dilatation progressive du col de l’utérus. Sa durée est variable, de 2 à 12 heures, voire jusqu’à 36 heures chez les chiennes qui mettent bas pour la première fois.

Durant la deuxième partie de la mise bas, les chiots sont expulsés. Lorsqu’un chiot s’engage dans le col utérin, la femelle se met à contracter son abdomen, afin de pousser le petit vers l’extérieur. Une expulsion peut durer quelques minutes à une heure. Le premier chiot est en général le plus long. Entre deux naissances, l’intervalle varie de 10 min à 3 heures.

 La mise bas anormale

          Les malformations utérines sont responsables d’un défaut de prolificité, et de difficultés au moment de la mise bas.
Lors d’hypoplasie du col utérin, aucun des chiots ne peut passer le col et atteindre le vagin.
          Les contractions utérines sont repérables par le comportement agité de la femelle, ses tremblements, et l’accélération de sa respiration.
          Ces contractions étant sans efficacité pour faire passer le col au chiot, l’utérus fini par épuiser ses forces au bout de plusieurs heures, impuissant à forcer cet obstacle infranchissable.
          A ce stade, les placentas ont été décollés par la violence des contractions. Les chiots, alors mal approvisionnés en oxygène en raison de l’interruption de la circulation entre la mère et le placenta, tentent de respirer et se noient dans le liquide amniotique.
           La mère se calme quand les contractions utérines sont épuisées. Elle reste alors prostrée, et un liquide jaunâtre commence à s’écouler de la vulve, témoin du décès des chiots dans l’abdomen. Seule une césarienne effectuée avant le décollement des placentas permet de sauver la portée.
           Lors d’hypoplasie d’une corne, les chiots de cette corne se retrouvent dans la même fâcheuse posture. L’accouchement se passe normalement pour les chiots présents dans la corne normale, mais seule une césarienne permet de délivrer ceux de la corne étranglée.

 Sauver les chiots

           Une césarienne ne peut être envisagée à n’importe quel moment. Elle doit être pratiquée quand la gestation est arrivée à son terme, et avant que les chiots bloqués ne commencent à souffrir d’un manque d’oxygène.
           Le maître doit s’assurer à l’avance qu’un vétérinaire pourra prendre en charge une césarienne éventuelle, y compris la nuit, car c’est le moment privilégié de la naissance des chiots.
           Dès que la chute de progestérone est détectée, le maître doit surveiller le comportement de la chienne, seul témoin des phénomènes internes qui s’opèrent. Après plusieurs heures d’agitation, de tremblements, de halètements, si la chienne ne présente aucun effort expulsif et ne contracte absolument pas son abdomen pour pousser un chiot au dehors, elle doit être menée chez le vétérinaire, afin qu’il puisse prendre une décision chirurgicale en cas de besoin.
           De même, la connaissance de la taille de la portée permet de surveiller l’expulsion correcte des chiots. Si le maître à le moindre doute sur le fait qu’un chiot reste à naître, et que la femelle ne fait plus d’effort visible depuis plusieurs heures, il faut la conduire chez son vétérinaire pour évaluer la vitalité du ou des chiots restant et la nécessité d’un recours à la chirurgie. 

Le suivi de gestation

          La fin de la gestation est indiquée par une chute de la progestérone sanguine de la chienne, qui peut être dosée par le vétérinaire. Une chute de la température rectale de un degré accompagne la chute de la progestérone sanguine, ce qui permet au propriétaire de surveiller lui-même la survenue de ce signal, à condition de contrôler deux à trois fois par jour la température. Cette baisse de température précède la naissance de 10 à 24 heures en moyenne, et ne dure que quelques heures, car le démarrage des contractions utérines provoque une remontée de la température corporelle de la chienne.

         Mais la détection de ce terme commence par une bonne détection de l’ovulation par le vétérinaire, lors du suivi des chaleurs. La naissance est alors prévue pour 60 jours environ après l’ovulation. Une première échographie est effectuée à 30 jours de l’ovulation, afin d’évaluer la taille de la portée. Une radiographie à 55 jours, permet de le préciser. Si la taille de la portée est réduite (un à trois chiots), la vigilance du maître doit être spécialement alertée, car cela peut être un signe d’une anomalie quelconque de l’utérus.

 Dépister les hypoplasies utérines

           Pour l’éleveur,  le dépistage de ces anomalies est important, car il influe sur la sélection des reproducteurs. La taille des portées est un bon indice de la présence ou de l’absence d’anomalie utérine, ainsi que la fréquence des césariennes. µ
            L’examen vétérinaire de l’utérus au moment de la césarienne reste cependant le seul test concluant dans le diagnostic de ces anomalies utérines. Etant relativement rares, elles sont peu connues des praticiens.
             Le dialogue entre éleveurs et vétérinaires peut déboucher sur une meilleure connaissance de leur incidence, pour le bénéfice des uns et des autres.

Recueillir des données sur le terrain pour faire avancer les connaissances

              Je reste à la disposition de tous ceux qui le désirent pour transmettre un dossier plus complet sur ce sujet, à destination des éleveurs de Westies de Scottish et de Cairns, mais aussi des vétérinaires, dans le but de faire avancer la connaissance dans ce domaine.

Si les éleveurs obtiennent un rapport chirurgical suite aux césariennes qu’ils rencontrent, je suis intéressée pour collecter toute les informations concernant l’examen de la morphologie de l’utérus, la taille de la portée, le déroulement de la mise bas, et la répartition des chiots dans les cornes utérines au moment de la césarienne.

Toute information sera traitée dans la confidentialité, dans le but d’apporter des réponses aux incertitudes scientifiques qui entourent encore ce sujet. Les résultats éventuels de cette récolte de données seront traités et transmis en respectant l’anonymat des personnes et des chiens.

 Docteur P. Picquot